La triple frontière, un exemple de zone grise de la mondialisation
La triple frontière est une zone à cheval entre le Brésil, le Paraguay et l’Argentine, largement réputée pour être une des zones grises les plus actives de la planète. Aujourd’hui sous surveillance américaine, les échanges n’en sont pas moins accrus.
Ce territoire s’est développé dans les années 1960 avec le projet des dictatures brésilienne et paraguayenne de construire un barrage: Itaipu. Il devient alors un levier d’intégration de la région et se développe autour un commerce intrarégional, basé sur la production énergétique notamment. Aujourd’hui, le barrage ne cesse de battre des records de production d’électricité et fournit aujourd’hui autour de 17% de l’énergie consommée au Brésil et 75% de celle consommée au Paraguay.
Un espace majeur d’échanges multiformes
La triple frontière est un des hubs les plus opaques de la mondialisation. Les échanges y sont permanents, multiformes et ne cessent de croitre. Par exemple, on y trouve Ciudad del Este au Paraguay, possédant le statut de zone franche, qui est en réalité un gigantesque marché noir où les marchandises réceptionnées sont redistribuées plus chères vers le Brésil. Cette ville est aujourd’hui au 3e rang mondial par les transactions commerciales derrière Hong Kong et Miami.
Aussi, les échanges migratoires sont importants : ce territoire est un carrefour migratoire qui forme une conurbation transfrontalière tripolaire entre Ciudad del Este au Paraguay, Foz do Iguaçu au Brésil et Puerto Iguazu en Argentine. Les échanges migratoires sont anciens et créent un espace multiculturel. Dès les années 1970, des habitants du Liban, de Syrie ou encore de Palestine sont venus s’installer. La décennie suivante, des Asiatiques ont pris place dans la région. Les habitants de cette zone sont appelés les « Brésiguayens » et on y parle une langue particulière, mélange entre le portugais et l’espagnol, le « Portugnol ». Ce territoire montre la difficulté de précisément définir les frontières entre certains pays. D’après les études de Sarah Mekdjian, la triple frontière serait un « territoire mobile » car près de 40 000 personnes traversent chaque jour le « Pont de l’Amitié », entre le Brésil et le Paraguay.
Finalement, la triple frontière est le paradis sud-américain de la contrebande et du blanchiment de cash criminel. Sur l’ensemble du sous-continent, les échanges sont intensifiés par la porosité des frontières, et cette région ne fait pas exception. Les trafics illégaux sont permis par l’aide d’un Etat paraguayen défaillant et une indulgence certaine du Brésil et de l’Argentine.
Cette zone peut également servir de clef de lecture des relations entre les Etats-Unis et l’Amérique Latine. Depuis le 11 septembre 2001, une surveillance permanente est en place car une crainte que la rente du commerce n’alimente des cellules terroristes plane.
Pour aller plus loin sur l’Amérique Latine : Dissertation – L’Amérique Latine entre la révolution et la réforme (Major Prépa)